mardi 9 septembre 2014

BOHÈME du SUD.


La grande place de Telc : du gothique au baroque.


Il y eut un Royaume de Bohème, le nom vient des "Boiens"  celtes , puis la dynastie des Premysls assura le développement de la région, sous Ottakar 1 et II, dynastie éteinte quand Jean de Luxembourg accède au trône.  la Bohème est alors rattachée à l'Empire Germanique puis à l'empire Austro-Hongrois.
Les villes proches de la frontière autrichienne et allemande furent donc occupées ou régentée par les souverains voisins entre le XVe et le XIXe siècle.
Les villes ont repris un nom tchèque, précédé de "Cesky", pour marquer l'autonomie retrouvée depuis l'indépendance en 1918.

Nous partons de Bechyne, charmante ville dominant une vallée, paysage d'illustration de livres d'enfants;

Sur la place de Bechyne.






 sur la place, le premier soir, des anciens visionnent un film des années soixante, où ils furent figurants. Nostalgie  d'un printemps.







Des familles se partagent le pouvoir dans chacune des cités médiévales, commerçantes et fortifiées; la Maison des Rosenberg domine la région, la rose du blason s'inscrit sur les bâtiments, comme à l'Abbaye cistercienne de

Vissy Brod

Autel de Vissy Brod








Dans la montagne au dessus de la Vitlava, actuellement centre touristique fréquenté par les amateurs de rafting, l'église de style gothique est riche d'oeuvres baroques. 



Tympan de la Sacristie
















Le choeur est dominé par un retable dont la peinture centrale est changée en fonction du calendrier liturgique : ici l'assomption de la Vierge.
Autre motif énigmatique : les renards représentant la peste au milieu des raisins.


La bibliothèque







Un musée, peuplé de statues baroques, et une  fantastique bibliothèque dont les salles "Philosophique" et "Théologique" sont ornées de plafonds peints fort colorés de la fin XVIIIe, perspectives hors d'échelle.




Cesky Krumlov

Vue d'en bas sur le château.

Amour!





On accède par les jardins du château sur la colline, parterres de broderies et fontaines baroques, pour descendre dans les cours.






Vue sur la cathédrale St Guy


Le passage couvert s'impose


La tour et les décors du château.
















Édifié à la fin du XIIe, et agrandi par les Rosenberg, décoré de "sgraffites", un passage couvert mène à la tour polychrome. 





La vue plongeante sur la ville dans un méandre de la rivière rappelle une oeuvre d'Egon Schiele, qui y séjourna (et fit scandale). Un petit musée lui est consacré sans originaux.

Egon Schiele: "Krumlau sur la Moldau", 1914





Trompe l'oeil


Rien n'a changé dans la Vieille Ville - piétonne! Les décors muraux des petites rues qui mènent à la place principale.



Décor de facade












Au passage, un arrêt dans la boutique des fameux crayons Koh-I-Noor, de l'art en boite.




Cesky Budejovice:


Place OttakarII

 Capitale actuelle de la province, Budweis, pendant la période germanique, elle fut fondée en 1265 par le roi Presmysl Ottakar II.
La place porte son nom, dominée comme partout par une Colonne  et l'architecture de l'Hotel de Ville, restaurée en baroque, et fort encombrée comme ailleurs par les voitures et les panneaux; autre peste pour le photographe.


Une idée des quantités produites.



La richesse économique de la ville tient aux ressources minières et surtout à la célèbre bière Budweiser. 








Chaine d'embouteillage

Nouvel emblème !
La visite de l'immense brasserie fut passionnante: 





Dans les caves

La dégustation de la première pression avant filtrage ( dans une cave glaciale) un pur moment de délectation.











Trebon:

Les châteaux de la famille, (photo volée)
Cette petite cité entourée de murs, aux rues tortueuses dans la région des lacs (et centre de pisciculture) est intéressante pour son château renaissance de la Maison des Schwartzenberg. 

Les salles meublées reconstituent la vie aristocratique, aux murs des collections de peintures (no photo) et une pièce dédiée aux recherches alchimiques de son propriétaire. Une autre brasserie modeste au bord de l'étang.


Holasovice :


LA rue, face à l'étang.


Décor "rural", XXe



Plus modeste, ce petit village des années 1850 aligne des maisons couplées de part et d'autre d'une place herbue, son puits et son arbre de Mai. Les pignons soigneusement décorés de motifs sont qualifiés de "baroque rural".






Jindrichuv Hradec

Le puits dans la cour du château  de Jindrichuv Hradec


Principauté de Vladislav Jindrich, frère d'Ottakar I, dominée par le château.
L'ancien collège jésuite actuellement transformé en musée abrite de belles sculptures médiévales dans la chapelle,  et des salles plus " traditions populaires".


Années trente.


La ville était la capitale de machines à coudre; 


Vue fragmentaire de la crèche














Plus célèbre, la crèche animée , réalisée par un artisan local, Tomas Kryza, au XIX, met en mouvement des centaines de personnages, animaux et ateliers, sur fond de paysages et d'architectures rurales ou historiques. Un "record".


Telc :


La grande Place de Telc


Dernière étape; un charme fou, la foule s'y presse, c'est jour de la fête du saint local. 
Sur la grande place, s'élève une Colonne de la Peste, qualifiée "d'envol de gros ballons" par Jana, notre remarquable guide pleine d'humour.


Détail de "la Justice"
Colonne de la peste




Telc, maison  "de la justice"


Les maisons aux pignons surhaussés sont reliées par des galeries, et décorées de "sgraffites". 

Les enfants sages, sur le mur extérieur du château. Début XXe

Le théâtre est aussi dans la rue.

Adam et Eve




Le château renaissance, de la famille des Hradec, organisé sur une cour dominant les jardins , outre des décors sculptés










 contient un tombeau funéraire dans une petite chapelle d'un baroque délicieux... 












On rentre à Prague, en savourant des paysages bien "peignés".




vendredi 5 septembre 2014

MUSÉES de PRAGUE /2.


I. Art Médiéval en Bohème



Triptyque "Roundnice" : La Mort de la Vierge, entre Vierge de Miséricorde et Christ de Douleur, 1410.



Le couvent Sainte-Agnès, dans la vieille ville et loin des foules, fondé par la soeur du roi Wenceslas 1er en 1234, recèle maintenant les chefs d'oeuvres provenant de divers monastères et églises du royaume; remarquablement présentés sur des cimaises grises et fantastiquement éclairés. Quelques autres espaces exposent des installations contemporaines.


Couvent Sainte-Agnès: vue d'une salle.


Les oeuvres de la peinture médiévale du XIIIe au XVe siècle suivent les évolutions de l'histoire.  Quelques pièces sont influencées par la tradition byzantine, puis, après l'apport des ordres cisterciens actifs sous le règne des Premyslides entretiennent des rapports avec la peinture occidentale. 
Les peintres cessent d'être anonymes sous Jean de Luxembourg, puis sous son fils Charles IV, créent un style proche de l'art flamand, puis allemand, lorsque que Prague devint capitale du Saint Empire Germanique en 1349.

Vierge de Miséricorde,  vers 1340





Le cycle de la vie du Christ est cependant souvent rapporté à celui de la Vie de la Vierge, en raison de la dévotion mariale, et les modèles de la Vierge à l'enfant se retrouvent encore dans les panneaux d'autel de certains monastères dont Vissy Brod.

 Résurrection: Un Panneau (parmi 10) Maitre de l'Autel de Vissy Brod, avant 1350


La singularité des peintures du XIVe tient au réalisme étonnant des figures, en contraste avec les fonds or.



Saint Luc
Saint-Ambroise





















Les Évangélistes et pères de l'Église par le Maitre Théodoricus, vers 1360 ont un regard étrange qu'on retrouve dans toutes les oeuvres du maitre.


 Crucifixion, Maitre de l'autel Rajhrad,  Olomouc, 1435. Époque post-hussite.



La statuaire
une tradition d'Europe centrale, les artistes, anonymes le plus souvent, travaillent le bois -peint ou non- dans un style "provincial", très réaliste voire expressionniste, s'inspirant des gens ordinaires.
Les retables, comparables à ceux de l'école rhénane, et les ronde-bosse  : 


Nativité, fragment de retable.

Les piétas et "Christ de Douleur" , autant de figures de dévotion dans des temps tragiques.

X de Douleur, fin XIVe



Piéta, fin XIVe















Détail, anonyme XVe












La collection d'innombrables "Vierges à L'enfant", montrent la sensibilité aux postures et aux gammes d'émotions expressives, inédites par comparaison à l'idéalisation usuelle en occident.







Anonyme, XVe
Anonyme XVe


























2.PALAIS VELETRZNI : Musée d'art moderne et contemporain.


Art Nouveau




Situé au nord du fleuve, cet énorme bâtiment moderne abrite sur cinq étages des collections d'une richesse incroyable.

Les visiteurs s'intéressent plus à la collection d'art Français du début XXe (ils sont tous là, de Monet à Picasso, et aux grands noms,  Klimt, Schiele, Munch.

Mais c'est l'originalité de la création tchèque qui m'a intéressée. Un choix très subjectif...

En commençant par Mucha et ses contemporains de la période Art Nouveau, Manes, Liska, Shikaneder, pour rompre avec des artistes influencés par l'impressionnisme.

Kupka : Le colosse de Rhodes, 1906-09


Les premières oeuvres de Kupka, dans les recherches sur la couleur, entre "péplum", orientalisme, et glorification de la nature.  Bien avant l'abstraction. (le Musée Kampa, dans Mala Strana est dédié à l'intégrale Kupka et Gutfreund - photos interdites).


Kupka : Soleil d'automne, 1905


Un groupe de "néo cubistes" ont fait preuve d'un humour délectable: Emil Filla, en particulier , parodiant Picasso, Gris, Matisse et quelques autres. 

Emil Filla, d'après Picasso







Gutfreund: l'atelier, bois.
























Otto Gutfreund, délaissant le pathos pour la défense du prolétariat. 



L'absinthe, 1924






M Stefan: Deux filles. Bois peint















Quelques réalistes tragiques mais aussi les figures des petites chéries modernes des années vingt :  

Bohumil Kafka : Douleur, vers 1915


Où l'on découvre qu'il y eut un autre Dvorak et un autre Kafka.




Atelier de Trnka





Un étage présente des oeuvres contemporaines assez dramatiques  et la reconstitution de l'atelier du réalisateur d'animation, Jiri Trnka. 

Le rez de chaussée expose actuellement l'incroyable saga d'Alfons Mucha.



L'ÉPOPÉE SLAVE.


Détail de : L'abolition de l'esclavage en Russie, 1914.


En vingt toiles, d'un format impossible, 610x810 cm ( non pas en pixels mais en six mètres sur huit, façon décor de scène), réalisées entre 1912 et 1928, dans un ordre non chronologique, Mucha a réinventé l'histoire tchèque, depuis des origines mythiques jusqu'à l'autonomie.


Détail de : Introduction à la liturgie slave, 1912; le moine Cyril lit la bulle du Pape au prince Svlatopluk.


Après les fêtes rituelles des populations primitives, les différents pouvoirs se succèdent: 
l'auto-couronnement du Tsar Siméon de Bulgarie, la cour d'Ottakar II de Bohème.

Couronnement du Tsar serbe Stefan Uros (1346) 405x480

on trouve la prédication de Jan Hus, les ravages des guerres hussites, l'abolition de l'esclavage en Russie, quelques héros, enfin l'Apothéose des Slaves sous la figure d'un Christ triomphant.


Détail du couronnement, 1923.  Huile et tempera sur toile.


Une facture étonnamment photographique, des effets de montage, les scènes illustrent des personnages sur fond d'architectures léchées. Aux antipodes des affiches qui firent sa célébrité, un aspect réalisme soviétique s'allie aux fastes et effets spéciaux du cinéma, (Mucha avait séjourné aux Etats Unis, avant C B.de Mille..) nombre de figures volantes, mais dans des gammes chromatiques très atténuées.  La technique de la tempéra à l'oeuf exclut les empâtements. 
 Un choc .


Introduction à la liturgie slave, 1912, 610x810 cm