vendredi 14 novembre 2014

IRAN 5/5 : Les Fastes d'ISPAHAN


Abstraction , Mosquée du Vendredi XIIe


Le regard des Iraniennes, claustra de Lorfollah. 


La ville médiévale, détruite par Tamerlan en 1388, retrouva son rôle de capitale lors de l'implantation de la dynastie des Safavides, venus d'Azerbaïdjan, qui reconstituèrent un état de taille équivalente à l'Iran actuel. Après Ismaïl, descendant d'une confrérie soufi, puis son fils Tahmasp, le royaume désormais officiellement shi'ite connait son apogée sous le règne de Shah Abbas 1er dit "Le grand", investi en 1587. Réduite en 1722 par l'invasion afghane, elle perd son rôle de capitale. 
Un siècle d'expansion territoriale, commerciale et d'échanges culturels qui fit d'Ispahan, selon la renommée, "La moitié du monde". 



Par chance cette moitié, remarquablement restaurée, peut presque se parcourir à pied, sous les arbres qui ombragent les rues.





Au nord de la ville, au coeur d'un marché animé et d'un bazar, l'édifice le plus important remonte à l'époque seljoukide, avant les transformations du XVe s.








La Mosquée du Vendredi:

Plan de l'état au XVe















Du premier état, des salles voutées sur colonnes de part et d'autre du grand eivan sud qui mène à la grande salle du Mehrab à coupole, construit par le vizir Nizam al Molk en 1080.




Mosquée du vendredi, la cour. L'eivan sud.
De très grand diamètre, et comme à Nain (voir ch4) c'est l'agencement des briques qui forme les motifs des piliers et des voussures. 
La cour centrale, à quatre eivans entourée d' arcades est décorée de faïences ajoutées au XVe. 



Coupole du Gonbad-e Khaki






À l'opposé, en traversant l'eivan nord, on accède à une autre salle à coupoles en côtes de melon et sur trompes, le Gonbad-e Khaki, de la même période.    

Mehrab d'Uldjaitu








L'eivan Est à voutes en stuc.









 














Minaret d'Ali
Une petite salle de prière, édifiée par le sultan Uldjaitu Khodabendeh, en 1310, ouvre sur le coté ouest de la cour, pure merveille de ciselure dans le stuc.

Dans le même quartier se nichent de multiples mosquées et mausolées: 
Le Minaret d'Ali, en briques du XIIe, jouxte une mosquée tardive. 


Ailleurs, une autre mosquée en briques: toujours des décors intégrés au système constructif.
















Le mausolée d'Haruniyeh


Modernisation du décor de façade.

Le Prophète et Hussein





Caché derrière une façade plus récemment illustrée des Imams et de martyrs - incroyable qualité hyperréaliste-  recèle des peintures du XVIe où figurent le prophète (voilé) et Hussein, ainsi que quelques scènes de genre ou historiques. 





LA VILLE SAFAVIDE.



Le palais Ali Qapu à gauche, la mosquée Lolfollah à droite.

La Place Royale, meidan-e imam ( ex meidan-e shah) accomplit le rêve du voyageur. Cet ensemble urbanistique conçu par Shah Abbas 1er, en 1598, associe le bazar, les mosquées et le palais autour d'une place dédiée aux festivités de l'époque, maintenant un simple bassin, des plantations et des calèches.



Vue depuis Ali Qapu



La Mosquée de l'Imam au sud s'ouvre par un haut pishtak sur un vestibule orienté à 45° de la place. 









Mosquée de l'Imam


Les très vastes salles de prière ornées de faïences comme les medersas latérales, en partie livrées aux restaurateurs et aux touristes sont intégralement recouvertes de décors fleuris à dominante bleue.  La coupole à double coque est en réfection. 





Entrée de Lorfollah





Sur le coté est de la place, le mosquée du Sheik Lorfollah fut commencée par Shah Abbas 1er, et ne comprend qu'une salle à coupole, sublime, dont le décor homogène retombe sur les murs et les niches.
























Un petit couloir en courbe, percé de claustras mène à la salle.

L'introduction du tonalités orangées mises en valeur par les fenêtres du tambour rend l'ambiance magique. 




















Le Palais Ali Qâpu:



Coupole de la salle "de musique".




Face à Lorfollah, la terrasse domine la place et fut une salle du trône pour Chah Abbas. Le palais s'élève derrière sur six étages entièrement décorés de fresques et de peintures  très "papier peint".







Le dernier étage, absolument merveilleux consiste en une série rayonnante de salles voûtées percées d'alvéoles en forme des flacons précieux qui étaient collectionnés.



Elle faisait fonction de salle de musique en raison de l'acoustique produite par ces découpages dans le stuc. 

Le Palais Chehel Sotun, "aux quarante colonnes", 


Statues-fontaines devant le bassin.
en fait 20 qui se reflètent dans le bassin est accessible à travers des jardins; il fut construit par Shah Abbas II. 


Les colonnes de cèdre et le toit en bois peint.
















Plafond de la salle du trône.







Le talâr, portique terrasse ouvre sur un eivan , au plafond de miroirs, la salle du trône, qui conduit à la grande Salle d'Audience. Un plafond voûté entièrement peint de motifs fleuris; quelques panneaux évoquent les "Mille fleurs" sans doute importés d'occident, de la même période.






Sur les murs, de grandes peintures à sujets historiques évoquent les hauts faits de la dynastie safavide. Le lecteur excusera la médiocrité des images...
Des batailles qui ont assuré la puissance du régime : l'histoire est ainsi résumée.


Ismaïl contre les ouzbeks.
Le fondateur de la dynastie: Ismaïl contre les Ouzbeks,  puis le dernier roi, Nader Shah en Inde. 
 Tahmasp: Une veduta importée d'occident.


La diplomatie et les festivités dont le raffinement n'exclut pas, comme l'ont rapporté Jean Chardin et Jean-Baptiste Tavernier, ambassadeurs de l'époque, les cruautés du régime.
Un même modèle régit chaque représentation.



  Tahmasp reçoit le Moghol Humayun (1560),




Shah Abbas "Le grand", reconnaissable à sa moustache.
Shah Abbas et ses hôtes dont le roi du Turkestan. Autant de galeries de portraits de personnages d'ethnies variées, des festins agrémentés de danseuses très flexibles...


Shah Abbas II, barbu , reçoit ses hôtes.





Sur les panneaux inférieurs, des scènes bucoliques évoquent les raffinements des moeurs, comme autant d'agrandissement de miniatures persanes : plus "orientales", en raison des apports de la peinture chinoise, ou plus occidentalisées avant que ne s'institue un style "persan".








le goût du vin, toujours présent dans ces représentations nous rend nostalgiques.













Dans les petites terrasses qui entourent le palais, des figures de personnages "à la mode" nous rappellent que les échanges avec l'Europe étaient contemporains de Louis XIII..











Art et Artisanat: 

Au bazar, l'art de la miniature sur papier continue la tradition  et  plus microscopiques, des scènes peintes sur os de chameau à l'aide d'un pinceau en poil de chat, persans ? 









et les tapis et autres impressions sur tissu au tampon.  De quoi rapporter un peu de rêve.











LES PONTS


Le pont Kadju
Au sud, on passe les ponts qui enjambent la rivière Zayandeh-rud, totalement à sec, période de grande sécheresse et barrages en amont rendent caduques les fonctions de déversoir. 




Le loisir et le transport demeurent: rencontres entres amoureux et réunions d'amis et de chanteurs sous les arches du Pont Kadju.










Le Si-o-pol "aux trente arches", avec voie centrale pour les caravanes mène au 

Quartier Arménien de Djolfa





La population arménienne expulsée de la ville de Djolfa en Arménie, puis intégrée sous Chah Abbas au sud d'Ispahan contrôlait le commerce et permettait les échanges avec l'occident.


La cathédrale "Vank" ; le clocher est extérieur au sanctuaire.




La Cathédrale Saint Sauveur "kelisa-ye Vank édifiée au XVIIe est couverte de peintures religieuses d'inspiration occidentale, bien que son architecture n'ait rien de chrétien.  Vaste coupole  à  Chérubins, Un Jugement Dernier terrifiant (de nudités). 






Coupole de la cathédrale

La préservation de la religion chrétienne est une particularité de la culture iranienne, en dépit des conflits.





Un évangéliaire,  XIIe au Musée

















Jugement dernier, XVIIe
Le petit musée présente une collection de manuscrits enluminés médiévaux et quelques superbes portraits de la période Qadjar.



Manuscrit enluminé Arménien.
Au passage, visite d'un pigeonnier, pour plusieurs milliers de volatiles dont les fientes étaient destinées à l'engrais. Construction de briques et pisé, sur plusieurs étages.






















Dernière soirée culturelle et culturiste, d'un actualité sans âge.

Le Zurkaneh: ou "maison de force": 



Le  morshed

des athlètes vêtus de culottes de cuir évoluent dans une petite arène en creux, sous les rythmes du tambour et le chant du morshed perché sur une estrade. Un ensemble figures où les efforts de "pompes" sur planchettes, au moins pendant 20mn, alternent avec des rotations de derviches et quelques manipulations de massues pesant au moins vingt kilos. 


La séance rituelle, quotidienne, se clôt par une salutation agenouillée des athlètes tenant à bout de bras d'énormes arcs, alourdis de rondelles de métal, face aux images de leurs prédécesseurs ou ancêtres qui tapissent les murs de la salle.






Plus qu'un sport, cette tradition pré-islamique est devenue un lien nationaliste quasi religieux. Mais un tel entrainement quotidien a sans doute permis aux sportifs iraniens de gagner les épreuves de force aux jeux asiatiques de cette semaine-là.




On repasse le pont, pour retrouver le caravansérail de luxe, et l'occident, en remerciant Fabrice et Ali de leurs choix. Fin du voyage.




2 commentaires:

  1. Superbe voyage qui donne des fourmis dans les pieds pour y aller voir...

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    1. Merci, ce fut en effet passionnant, les voyages continuent à maintenir éveillé sur les cultures.

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