Le 1er octobre, sur le Barkhor, les tibétains doivent accrocher le drapeau chinois. Certains n'ouvrent pas. |
Retour
à Lhassa :
De
Shigatze, assez frustrés de ne pas poursuivre la découverte des paysages et
lieux de l’est du Tibet, on reprend la route principale pour Lhassa qui suit la rivière :
Quelques champs d'orge au ras du torrent |
au-dessus des gorges, à chaque méandre, des ponts en construction et des
tunnels en cours de creusement pour le train.
Villages abandonnés |
Lorsque
je demandai à Chen pourquoi continuer la ligne de chemin de fer au-delà de
Lhassa, la réponse simple, naïve ou cynique, « pour acheminer l’armée sur
la frontière de l’Inde ». On tremble, mais le pharaonisme du chantier
laisse à penser qu’il faudra attendre un peu.
Chantiers en cours |
Il
semble qu’un train entre Kunming et Bangkok, via le Laos, soit aussi à l’étude.
Le réseau s’étendra donc sur tout le sud-est asiatique. Une expansion sans fin.
Vue de Lhassa ouest, la ville chinoise. |
Le contrôle des véhicules est constant,
(des radars qui flashent) des arrêts pour compenser les « excès » de
vitesse de notre chauffeur - la durée du trajet est vérifiée (au risque de la suppression du permis)-,
sans doute pressé de rentrer chez son épouse, charmante.
Lhassa la vieille ville tibétaine, contrastant avec les immeubles
chinois,
Transport de tissus dans la ville ancienne, maison de Lamas |
les constructions du centre piétonnier conservent leur architecture,
normalisée par les fenêtres.
Les réverbères de la rue de notre hôtel sont un curieux métissage du moulin à prière et du zhi (cette pierre qu'on voit au cou des nomades) et qui vaut dit-on une fortune.
Les moulins à prière d'un petit temple sur le Barkhor |
Tenues ethniques |
Autant
de boutiques que de maisons autour du Jokhang. Tenues monastiques, librairies et souvenirs.
Un jeu de mots en anglais! |
Mais aussi des grands magasins dominant la place des
bijoutiers.
Les
cours intérieures des vieux immeubles habités par plusieurs familles (on compte
les compteurs) sont proches de taudis ;
Tricoteuse |
Notre guide n’a pas l’eau à l’étage, ni
toilettes dans la cour, ni chauffage, même s’il ne neige que rarement
-réchauffement climatique- les nuits sont glaciales. Mais le choix de rester
dans la communauté prime sur l’hygiène des immeubles chinois (chers) des
quartiers extérieurs.
La fontaine collective |
Peu
d’enfants d’age scolaire dans les rues ; dès le primaire, ceux-ci doivent
apprendre le chinois et l’anglais en plus du tibétain ; une performance
quand les langues et la graphie sont aussi différentes. Tout panneau
publicitaire est en trois langues.
Les thangkas à la chaîne |
Le
dédale des rues de la vieille ville est truffé de petites entreprises
textiles, de boulangeries et de restaurants traditionnels. Les ateliers de
thangkas travaillent jusqu’à pas
d’heure.
Cour fleurie du monastère |
Monastère
de femmes : le Tsamkhung
Nunnery:
150 nonnes vivent dans un pâté de maison
enclavé de la partie sud-est de la
vieille ville, non loin d’une mosquée.
Le
bâtiment a été construit autour d’une grotte de méditation du roi Tsong tsen
Gampo, petite chapelle au bout d’un couloir.
Pétrissage |
Gâteaux pointus |
Dans
l’entrée de la salle de prière
(récitation de mantras comme dans les monastères
masculins)
certaines nonnes fabriquent des gâteaux teintés de rouge, d’autres
des décors en beurre rance (les mains trempées dans
l’eau
froide).
Atelier d'écritures |
Dans une salle voisine, un groupe de novices roule et ligote des
sutras.
Entre les chapelles et la rue, les
nonnes tiennent aussi un restaurant pour pèlerins et une boutique d’objets de piété.
Restaurant du monastère. |
Sur le Barkhor, jeunes et vieux, moines et civils. |
Un Cham |
Tout
en convoitant les vitrines, encore plusieurs tours du Barkhor pour observer les
pratiques et les costumes. On repère parmi les pèlerins de grands et beaux
hommes vêtus de noir, une tresse enroulée tenue par des rubans rouges, le
poignard à la taille. Ce sont les éleveurs nomades du Cham, la région orientale
du Tibet, voisine du Sichuan et du Yunnan. L’élevage est la principale
ressource économique, hors de la vallée.
Couple nomade |
On
trouve une mine de renseignements historiques sur les rapports du Tibet à la
Chine, et à la Mongolie pendant les années de guerre dans : Les Aventures
d’un espion japonais au Tibet.
Hisao
Kimura, un jeune Japonais déguisé en moine, traversa les territoires
d’influence bouddhiste depuis la Mongolie jusqu’en Inde (via le Qinghai et
Lhassa), à pied ou en caravane de pèlerins et marchands.
Il
informe de la vie dans les monastères, des réseaux de trafics, de la vie des
tibétains émigrés, jusqu’à son expulsion lors de l’arrivée des communistes puis
l’exil du Dalaï Lama en 59.
Le
récit de son expédition dans le Tibet oriental, le pays de Cham, concorde avec
les descriptions que fait Peter Goullard (Forgotten Kingdom) des nomades tibétains qu’il rencontrait au
Yunnan, les luttes politiques de ce peuple contre les deux
« envahisseurs » alternatifs chinois ou tibétains,
Bijou de coiffure |
ainsi que leur rôle
dans le commerce (et le banditisme).
La
dévotion n’exclut pas les achats.
Les élégants |
En gros ou au détail.. |
Vendeuse au marché |
Figures fascinantes, les femmes sont aussi couvertes de bijoux,
leur richesse portative.
Beurre de yak |
Plus
loin, un marché couvert de fruits et bonbons, un déstockage de cocottes et
cuiseurs à riz, les carcasses sur les vélos ; le beurre, les fromages (de
ceux qui, en boulettes, ne fondent jamais).
Le long de la partie est du Beijing
Street, côté vieille ville, les
boucheries tenues
par les Hui vendent le yak en cubes congelés.
Un spectacle tibétain « historico-folklorique » et néanmoins superbe,
comme à Kunming, est annoncé par
voie d’affiches. Une vieille femme, qui porte ses rangs de colliers semble perplexe. On ne verra que des touristes.
L'eau, la terre, le ciel |
Entre décors et effets spéciaux dignes
de superproductions hollywoodiennes, ou taiwanaises, des symboles, montagne et
rayons de soleil (allusion à l'ancien drapeau ?) les danseurs, chanteurs et musiciens jouent une histoire
mythique du Tibet
Célébration des récoltes de l'orge |
qui se clôt par des scènes de paradis
multi-confessionnels. Bon, Hindouiste et bouddhiste.
Les bonnets jaunes |
s’insère entre des scènes d’intérieur
chinois dans des compartiments latéraux et des danses du pays Cham.
Un
public clairsemé de touristes chinois occupés avec leurs téléphones semble
totalement indifférent, ne se réveille que pour l’hymne national et sort sans
applaudir.
Et
le dernier matin, la police fait une descente générale sur le Barkhor pour
obliger les commerçants à accrocher le drapeau rouge. Le lendemain, 1er
octobre, sera Fête nationale.
Occasion d’une semaine de vacances pour des chinois vers des régions
moins hostiles.
L’avion
qui transite cette fois par Chungking est plein. Dernière vision de la
Chine : le stand de vins du duty free: la cuvée
« Marylin » ou « La Perle ». Notre guide chinois nous avait offert
une bouteille de « The great wall ».
Nos émerveillements ne cesseront jamais, mais
l’analyse du système continue de nous inquiéter. Quel devenir pour les
tibétains et les autres minorités (même protégés par le Bouddha du
Futur) ?
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