jeudi 27 février 2014

TANA TORAJA . Indonésie 3


Le PAYS TORAJA



Artisanat local : une synthèse des traditions


Au centre de l’île des Célèbes,  la conservation des traditions  et l’architecture des villages m’avaient fascinée,  depuis la lecture de Nigel Barley : L’anthropologie n’est pas un sport dangereux.


Un site funéraire au milieu des rizières.

Faute d’expérimenter le trajet Mamasa / Rantepao, à cheval, c’est sur porte bagages de mobylettes que j’ai visité les nombreux villages  construits dans les collines.


Entrée de la Mosquée



Rantepao : dans le centre, tous les édifices publics sont complétés d’une «proue » en forme de grenier ; même la mosquée, le local du parti ou le commissariat. Sans distinction de religion ou d'animisme: 

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Les villages traditionnels, une rangée de maisons  de bois  sur piliers fait face à la rangée de greniers à riz  sur plateforme encore plus complexe.

Construction d'un grenier,  première étape.











La construction en cours, montre un premier échafaudage qui supportera le cube de stockage.








La toiture du grenier en lamelles de bambous  dominé par une couverture de chaume.  Comme ailleurs la tôle remplace souvent le végétal, mais la hauteur des pousses fleuries atteste de l’ancienneté de chaque maison ou grenier.


Le site de Kete kesu.

La parenté entre les formes des navires et celle des toitures est  renforcée par le système des ouvertures. On accède au logement par une échelle, le volet sculpté ouvre sur des pièces compartimentées avec un seuil, et les fenêtres,  se soulèvent comme des sabords.
Intérieur à Kete Kesu











 Situé près d’un terrain truffé de mégalithes, le village très touristique de Kete Kesu, accepte les visites, contre espèces sonnantes. No photo. Riche aussi en  boutiques d’artisanat local. 


Piliers symboliques



Maison à Kete Kesu


L’avant-toit des maisons, assez larges, est supporté par un pilier orné des cornes des buffles sacrifiés.  Des mandibules le long des poutres. Là encore le nombre atteste de l’ancienneté et de la richesse du propriétaire.








Deux greniers, avec chiens couchés.






 Chaque grenier, sur plateforme qui abrite les discussions et les siestes,  se démarque par les variations de la façade sculptée et peinte : le motif de tête de buffles  s’insère dans des entrelacs fort complexes.  ( lire Nigel Barley, pour l’épisode de la construction d'un grenier au Musée de Londres).


La douche du condamné.











Des buffles, partout, donc, dans les rizières, pour traîner les charrettes, pour les sacrifices, et que l'on bichonne.  



LES RITUELS FUNÉRAIRES.




Dans le premier village visité, un défunt en attente derrière les draps  : 





le seul vivant repérable finissait le cercueil, qui sera ensuite transporté dans un catafalque en forme de grenier, lequel sera abandonné sur le lieu de l’ensevelissement : autant de niches creusées dans la falaise. 

Catafalque au pied des caves







Le rocher était proche du village, mais dans une jungle où les énormes gouttes de pluie le disputaient aux chutes de sangsues. Ne  jamais oublier les cigarettes.  Pour les cadeaux mais surtout se débarrasser de ces sales bestioles. Beurk.











Dans les villages  les plus célèbres, les grottes funéraires,  sont gardées par les  tau tau :



Les tau tau de Londa


Les défunts au balcon sous forme de statues, grandeur nature  à l’effigie du mort . Vêtues, chaussées de lunettes et  un peu décaties selon les sites.


Cigarettes pour le mort.







Au balcon à Londa ,  des volets empêchent les vols,   site fort  visité où ses empilements de cercueils de tous styles emplissent des grottes.


Les tau tau de Lemo





À Lemo  un caveau en cours de creusement,  dans une falaise à étages. Mais ce n'était pas la saison de la sortie rituelle et du nettoyage du squelette, autre pratique permettant une série de libations et de sacrifices.












 Dans les collines, des sites funéraires ponctuent les routes,  accompagnés d’un écriteau Salamat datang : bienvenue .  Les  fermetures fort décorées quelquefois de signes chrétiens.






Dans un autre village, on nous invita à une cérémonie, une construction d’un édifice sur l’aire de cérémonie était en cours, mais il n’était pas possible de revenir  aussi loin aux aurores le lendemain.


Aire de cérémonie en préparation

En revanche à quelques kilomètres de Rantepao, je découvris une aire à abattre, vide : des constructions semblables aux greniers, entièrement peintes en rouge. Au centre des pierres dressées et la statue d’un ancien, le  tout dans une terre détrempée mais rouge. Ce n’était pas seulement la pluie…



Alang à Marante
  
Plus loin, une autre aire fort animée : Un Alang, avec quatre bêtes attachées en attendant le lendemain ; dans les loges, numérotées comme au théâtre, la famille joue aux cartes, boit et augmente les enjeux du nombre et du prix des bêtes sacrifiées.


Buffle albinos, le plus cher, le premier de la liste.
 Ce sacrifice peut provoquer la ruine  et un endettement à vie au nom du mort. Le buffle albinos atteint des sommes équivalent à dix ans de salaires ou plus.


Dans les loges.

Âmes sensibles et végétariens s’abstenir.

Visions des flots  qui coulent du cou de la bête  qui s’effondre, le sol est  ensuite pudiquement masqué par des palmes. 
L’une d’elles, mal coupée, se rua dans le public, tenta une sortie en arrosant  les assistants, le boucher la rattrapa difficilement.




Le quatrième buffle fut finalement gracié, (enchères insuffisantes ?) ou remis à la séance suivante.


Fin de partie

Récupération des cornes, le cadavre  est immédiatement dépouillé, la peau part bien pliée, et la découpe de la viande sera servie, grillée aux convives et assistants.  Je renonce.


Un guide spirituel





Écoeurée par l’odeur tenace  du sang, je partis  à pied  à la recherche de Nangala, un village recommandé  pour ses 14 greniers: escortée à travers champs par un pasteur protestant  (les églises se disputent une population qui reste animiste).

Nangala, l'effondrement.
Le village venait d’être littéralement soufflé par une tornade : des tas  de fétus de grenier dont l’affaissement imite la chute des buffles.

Antiques à vendre?






La maison faisant office d’entrée payante, était en l’occurrence déserte, une collection de  vieux tau tau attend. 





les aliens









Plus haut dans les collines, à  Batumonga, une famille de tau tau non peints est prisonnière d’un hôtel, des aliens encore anonymes ?












Autres randonnées à pied, sur  porte-bagages  de mob ou en stop pour les villages  et  cimetières, simples trous dans la falaise, ou, pour les nouveaux-nés, les creux des arbres.
Un moment de grâce :   en  traversant des rizières, on tombe sur un petit lac dans lequel les gamins s’ébrouent (j’en fais autant ) alors que  sur une plateforme un prêtre fait un service  religieux pour une classe d’ados.






Dans un bouiboui au détour d’un marché, l’expérience culinaire  décisive: 

Pa'piang



le Pa’piang : très longue cuisson de viandes (abats ?),

  et d’herbes dans un tube de bambou, arrosé d’un vin de palme très alcoolisé.  Fin d’un séjour passionnant .  Et un bon café local pour la route.  



Hommage à l'économie agraire.

SULAWESI. Indonésie 2



Les Célèbes, côté mer.

Kadidiri, vers un site de plongée.




Embarquement à Surabaya
De Surabaya, après une traversée assez épique de Java, entre inondations et trombes d’eau, on prend le bateau de ligne qui assure la liaison avec Makassar, (Ujung Pandang).  Capitale économique du sud de l’ile.










Des cabines de classes variables, non mixtes, et quasi désertes, le restaurant de niveau compatible, où l’un des dîneurs me demanda si j’étais une missionnaire. Boite de nuit, les bouteilles d’alcool sont factices.

Avant la clôture pour 30 heures.

N'était pas contre les images.



  

La plupart des passagers dorment sur le pont ou dans les escaliers.  La mosquée du pont supérieur fait le plein des hommes.  Un long débat théologique m’occupa plusieurs heures avec un petit imam très intégriste, qui avait enseveli sa jeune femme en noir total, avec bébé, sous une tente d’infortune dressée entre deux escaliers. 

Celle-ci à l’arrivée, le lendemain, ôta son gant et souleva son voile –beaux yeux-  pour me remercier d’avoir pris des nouvelles de l’enfant, dans un anglais impeccable, «  I’ts so nice to meet you ! ». 


Hôtel standard plus.




 La recherche d’un hôtel aboutit au pur modèle chinois, 
non sans avoir parcouru « vagina street » et ses pseudo-karaokés, raccolés  par des minettes à peine pubères.
 Superbes restes de temples, chinois encore, quelquefois reconvertis en garages, 




et au large, au-delà d’une plage crapoteuse dont Nigel Barley fit une description hyperréaliste, sur un îlot, un village de vacances  en déshérence n’espère pas de clients ; le bateau en oublie ses passagers. Il pleuvait toujours. Un rideau épais. Rien à voir... 

L'église dans Fort Rotterdam.

En attendant le bus pour Rantepao, la visite du musée Negeri Le Galigo tout  fait passionnant, dans le Fort Rotterdam qui conserve des objets rituels et des maquettes, donne un avant-goût du territoire.





  




Huit jours plus tard, quittant le pays Toraja   (épisode précédent), vers le nord, quelques heures de bus  dans un paysage verdoyant et  très tortueux.  Mon intention (idée du Lonely Planet) était de traverser le lac Danau, à partir de  Pendolo pour gagner ensuite la côte du côté de Poso. Le bateau n’existait plus et je fus, avec Nino, un autre naufragé du coin de la route, hébergée dans un charmant hôtel de bungalows roses, au bord de lac :


retour de la pêche sur le Danau Poso



une vue aussi délicieuse que la température du bain et l’accueil de la patronne rigolote qui avait vu les  Champs-Élysées.  Poissons grillés de luxe. 

Finalement nous avons trouvé un taxi collectif branlant puis, après quelques errances  de petits ports en petits ports, à Ampana, nous avons pris à  un bateau , quelque peu boat people, qui rejoignait les  îles Togean. 



Vue sur Wakai.



Tranfert  de bateaux

Une manière de couper le golfe en évitant des dizaines d’heures de bus. À l’embarcadère du port de Wakai, maisons lacustres assez boueuses, quelques restaurants sur pilotis abandonnés  moisissent.


"Selamat datang"  (welcome) 










 Les gamins jouent aux échecs ou à faire le pitre sur des statues peintes dont l’Indonésie a le secret.




Kadidiri







À peine débarqués,  un marin nous entraîna dans un esquif à balanciers mais gros moteur, destination Kadidiri  Paradise.  L’art de trouver des clients pour un site fabuleux :




La "cabine téléphonique".







bungalows les pieds dans l’eau, pension complète à un tarif  défiant  toute  concurrence, plongée sous-marine  sur les récifs de corail,  encadrée par un Suisse (!) et trois binômes de voyageurs  qui avaient atterri là par hasard. Très cosmopolites et polyglottes. 







Un seul point pour capter le réseau.


La livraison des fruits

Et il ne pleuvait pas.  Couchers de soleil de carte postale.




 Une  semaine de rêve imprévue à compter les poissons Picasso  qui  patrouillent au bord de la plage, en attendant le bateau  suivant, un ferry sans voitures.



Picasso





Qui arriva, chargé de riz et de passagers, et dont l’équipage sous-louait discrètement ses cabines pour le confort des « blancs » et quelques dollars de plus.


Classe soute mixte












 Nous étions quatre à  vouloir trouver un avion, l’un pour Manado et la Thaïlande, (il a dû subir 16 h de bus), les Hollandais pour aller voir les dragons de Komodo, moi pour essayer  de rejoindre Sumba.






Le tohu bohu de l'arrivée, et les cris, un autre bateau avait coulé. Lequel? 


La course pour l'aéroport

À Gorontalo, précipités dans des rickshaws, sur une route bordée de lampadaires en récupération de roues de vélos  (Duchamp a encore frappé)  ,  « Sorry  Mam, avion full book » ! 
Gorontalo Multiculturelle



En pleine campagne électorale, chaque maison affiche les drapeaux de son candidat ; des couleurs claquantes au long des rues.






Wartabone











La ville est sympathique, l’hôtel ombragé, de jolies maisons  traditionnelles  à véranda voisinent avec des temples chinois mais coiffés d’une coupole copiée sur Borobudur, alors que la population est principalement musulmane ou chrétienne. 
Monuments partout, le guerillero anti-hollandais, Nani Wartabone indique la route à suivre...







Une bonne étape pour trois  jours de ballade le long des pêcheries  -fort odorantes sous un soleil de plomb:


Une femme âgée ramasse des coquillages 



en attendant l'heure d'embarquer
  



les rencontres  souriantes – avec trois mots d’anglais- des Minahasans de l’ethnie locale.  Les pêcheurs  de bonites jouent aux cartes  ou à quoi ?  et siestent ; 








Le bonheur du jour


  






sur une plage des cabanes  délabrées   et 
dans une zone de « résidences d’été », les femmes  voulaient poser pour la photo, on m’a présenté tous les enfants, et même le micro-onde.





Piscine sans eau






Une randonnée pédestre avec les amis hollandais vers des cascades   et un centre de loisirs  (à sec) se termina dans les  torrents de boue. 
 Fin de la période bleue.